Le ministère de la Transition écologique "est à la veille de l’extinction", alertent les syndicats du MTES

vendredi 10 mai 2019

Source AEF

Les syndicats des ministères de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires ont lancé un cri d’alarme sur les conditions de travail des agents des deux ministères, jeudi 9 mai 2019, en marge de la grève unitaire dans la fonction publique contre le projet de projet de transformation de la fonction publique. Le ministère de la Transition écologique "est à la veille de l’extinction, et s’il tient, c’est parce que ses agents tiennent contre vents et marées", juge Laurent Janvier, pour FO.

Les syndicats du ministère de la Transition écologique estiment ne pas être écoutés par François de Rugy.

"Le projet de loi de réforme de la fonction publique porte en lui les germes de la fin des compétences de l’État", craint Simon Lery, du syndicat SNE-FSU. Le texte prévoit notamment un recours accru aux contractuels, lesquels ne bénéficieront pas du statut de fonctionnaire qui permet de résister aux pressions politiques, selon le syndicaliste. Or, cette mesure n’est qu’une étape d’un mouvement plus large.

Prise de pouvoir des préfets

Les syndicats dénoncent aussi une récente décision qui fait passer la gestion des DDI dans le giron du ministère de l’Intérieur et non plus du Premier ministre. "Les préfets ont mis la main sur les services de l’État, ce qui pose la question de l’indépendance des agents", juge Laurent Janvier pour Force ouvrière. "Jusque-là, il y avait la possibilité d’avoir des lieux où on disait : ’ce projet n’est pas possible’. Désormais, toute décision sera liée à l’avis du préfet et aux pressions qu’il subit." "On sait bien qu’avec lui, c’est rarement l’environnement qui gagne", abonde Simon Lery.

Autre mesure récente qui fait bondir les syndicats : l’expérimentation territoriale d’un droit de dérogation par une quinzaine de préfets (1), qui pourrait bientôt être généralisée. Le préfet peut ainsi déroger à des normes relevant de divers domaines (environnement, agriculture, forêts, emploi, aménagement du territoire, construction, logement, urbanisme, protection du patrimoine culturel, activités sportives, etc.). Dans les faits, "80 % des sujets concernent nos deux ministères et les architectes des bâtiments de France", assure Laurent Janvier.

– 40 % d’effectif depuis 2007

Cette "préfectoralisation des politiques" s’ajoute à une forte diminution des effectifs que connaît le ministère ces dernières années. En 2019, ce sont 1 300 postes qui doivent être supprimés, après 1 400 en 2018. Soit "une baisse de 40 % des effectifs" depuis la création du "grand ministère" voulu par Jean-Louis Borloo en 2007, au moment du Grenelle de l’environnement. "Chaque année, nous sommes soit médaille d’or, soit médaille d’argent" des ministères perdant le plus d’effectifs, ironise Laurent Janvier. Résultat : certains agents ont connu trois réaffectations en moins de dix ans, ce qui entraîne un mal-être au travail, voire des suicides. Fabienne Tatot, pour la CGT, en dénombre au moins "un par mois depuis fin 2018".

Simon Lery dénonce "la contradiction" qu’il observe entre l’affichage de l’exécutif sur la biodiversité (lire sur AEF info) et "la baisse des moyens" dévolus au futur Office français pour la biodiversité (issu de la fusion de l’AFB et de l’ONCFS). En tout, 200 emplois devraient être supprimés d’ici à 2022. Or, le gouvernement affiche "l’objectif de faire plus de contrôles ! On ne sait pas par quel miracle on y arrivera".

S’agissant du 11e parc national des forêts de Champagne et Bourgogne, les syndicats craignent qu’il soit créé uniquement à partir des neuf emplois déjà existants pour la phase de préfiguration.

"On bascule dans un monde différent"

Quant aux Voies navigables de France, ses moyens sont tellement réduits que l’établissement a adopté un "plan de dénavigation", dénonce Malvina Simon, du Syndicat national des ingénieurs des travaux publics et des collectivités territoriales. Ce qui signifie que certains sites ne vont bientôt plus être ouverts à la navigation.

"Entre la prise en main des services de l’État par les préfets et le développement des établissements publics, dans lesquels il est plus facile de recruter des contractuels, on bascule dans un monde différent", juge Francis Combrouze, pour la CGT. "On est à la veille de l’extinction et si le ministère tient, c’est parce que ses agents tiennent contre vents et marées", dénonce Laurent Janvier.

(1) L’expérimentation concerne les préfets des régions et des départements de Pays de la Loire, de Bourgogne-Franche-Comté et de Mayotte, les préfets de département du Lot, du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Creuse ainsi que le représentant de l’Etat à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

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